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Pollinose

La pollinose est une affection très répandue dans le monde. Les études scientifiques estiment sa prévalence entre 10 et 30 % de la population mondiale (1). Au Maroc, une étude multicentrique (2) a révélé que les sensibilisations aux pollens chez les patients suivis pour asthme et/ou rhinite et/ou conjonctivite sont de 28 %. La prévalence la plus élevée a été enregistrée dans les villes de Meknès (56 %), Béni Mellal (48,1 %) et Marrakech (43,5 %) et ne semble pas être influencée significativement par l'âge, le type d'habitat ou le sexe des patients.

A chaque saison son pollen
Les spécialistes distinguent plusieurs types de pollinoses selon le type de pollen d'arbre ou de plante présent dans une zone géographique donnée. Au Maroc, la plus fréquente est celle de l'olivier, arbre très répandu dans le royaume et dont l'index d'allergénicité est parmi les plus élevés (tableau 1). Sa prévalence est estimée selon les études entre 6,4 % et 40 %. D'autres pollinoses sont également retrouvées, notamment l'allergie au pollen de cyprès (3,8 à 20,7 %) et aux graminées (1,5 à 31,8 %). Même si les pollinoses sont associées au printemps, chaque arbre ou plante a sa propre saison pollinique (tableau 2). Celle de l'olivier, par exemple, commence à partir de fin janvier et se prolonge jusqu'en mai, voire parfois début juin. Durant cette saison, les personnes qui présentent un terrain atopique (prédisposition de l'organisme à développer une allergie) et sont exposées au pollen entament une phase dite de « sensibilisation » durant laquelle leur organisme produit des immunoglobulines E (IgE) spécifiques contre le pollen. Lorsqu'elles sont en contact l'année suivante avec le pollen, les allergènes commencent à se fixer sur ces IgE, déclenchant la libération de l'histamine et des médiateurs de l'allergie : les leucotriènes et les prostaglandines. Ce processus est responsable de l'apparition de la rhinite allergique, de l'asthme et de la conjonctivite allergique.

Diagnostic basé sur les prick-tests
Le diagnostic de la pollinose repose sur l'examen clinique, l'interrogatoire et surtout les tests cutanés (prick-tests). Il doit être réalisé impérativement par un spécialiste en allergologie qui est plus à même d'interpréter les résultats. Le praticien procède d'abord à un examen clinique visant à déceler l'ensemble des manifestations allergiques (asthme, rhinite et conjonctivite allergique) qui pourraient être dues au pollen. Il interroge ensuite le patient sur la rythmicité de ces manifestations afin de vérifier si elles coïncident avec la saison pollinique. Pour confirmer le diagnostic et détecter les allergènes responsables des signes cliniques, le médecin doit effectuer une série de prick-tests qui consistent à introduire dans l'épiderme, par le biais d'une aiguille hypodermique, des substances contenant des allergènes déposées au préalable sur la peau et à observer ensuite la réaction du patient. Les piqures peuvent être effectuées dans le dos, le bras ou la face antérieure de l'avant bras en veillant à espacer les zones de test de 2 à 3 centimètres. En cas de réaction allergique à l'un des allergènes testés, la zone piquée développe une papule et un érythème et le patient éprouve des démangeaisons. Cette réaction est connue chez les spécialistes sous le nom de « Triade de Lewis » et confirme l'allergie du patient au pollen. Le test peut parfois révéler une allergie à plusieurs types de pollens. La personne est alors appelée « poly-sensibilisée ». Pour s'assurer de la fiabilité des tests, le patient doit veiller à ne pas prendre de médicaments antihistaminiques durant les trois à cinq jours précédant la consultation pour éviter le risque de faux-négatif. Il doit aussi s'abstenir de faire les tests en cas d'infection ou de lésions cutanées. Chez les personnes ayant déjà été victimes d'un choc anaphylactique ou d'une réaction allergique sévère, le praticien doit procéder à l'évaluation du bénéfice et du risque avant d'envisager la pratique des tests.

Traiter les symptômes
Une fois l'(les)allergène(s) identifié(s), le patient doit suivre un traitement visant à atténuer les symptômes de la pollinose, voire parfois les éradiquer définitivement. Les schémas thérapeutiques varient selon le type de manifestations allergiques du patient et leur persistance. Pour l'asthme, le traitement de fond repose sur l'utilisation de l'association corticothérapie inhalée + béta2 mimétique à libération prolongée. Dans la majorité des cas, l'asthme est associé à la rhinite d'où l'importance de traiter les deux affections en même temps. Pour la rhinite, le traitement de fond consiste en une corticothérapie par voie nasale associée à des antihistaminiques. En cas de rhino-conjonctivite allergique, le traitement préconisé est une corticothérapie nasale et des antihistaminiques par voie locale pour agir sur les symptômes de la conjonctivite et de la rhinite. Parfois, la rhino-conjonctivite allergique est associée à un asthme débutant. Dans ce cas, outre les thérapies de la rhinite et de la conjonctivite, il est recommandé d'instaurer un traitement pharmacologique de l'asthme à base de corticothérapie inhalée et de broncho-dilatateurs. Il doit démarrer avant le début de la saison pollinique, être maintenu durant toute cette saison et être arrêté une fois la période critique terminée.

Apport de l'immunothérapie allergénique
Ces traitements ont prouvé leur efficacité et tolérance à court et à long terme. Le seul traitement qui, à ce jour, permet d'agir significativement sur le terrain immunologique du patient et l'étiologie des manifestations allergiques est l'immunothérapie allergénique. Cette approche thérapeutique permet de modifier significativement la réponse immunitaire du patient et de prévenir ainsi les manifestations allergiques liées au pollen. L'immunothérapie est généralement commencée 2 à 3 mois avant le début de la saison pollinique. Une dose d'attaque est maintenue durant toute la saison puis le traitement est arrêté à la fin de la saison. Le protocole est reconduit l'année suivante. Il permet dans 70 % des cas une éradication de l'allergie. Il existe actuellement trois formes d'immunothérapie allergénique : sublinguale, sous-cutanée et orale. Cette dernière est la plus récente et vient d'être lancée dans certains pays comme la France.

Difficile à prévenir
Outre le traitement pharmacologique et l'immunothérapie, l'éviction pollinique constitue un axe important de la prise en charge de la pollinose. Elle est toutefois difficile à mettre en place, surtout pour les personnes exposées en permanence au pollen durant les saisons polliniques. Dans certains pays, il existe un service d'alerte météo qui prévient les patients allergiques des zones de concentration des différents types de pollens pour qu'ils puissent les éviter. Les collectivités locales peuvent aussi jouer un rôle de premier plan dans la baisse de la fréquence des allergies dues au pollen en mettant en place des mesures d'éviction collective, notamment la limitation de la plantation d'arbres à fort potentiel allergisant à proximité des zones d'habitation.